mercredi 8 décembre 2010

Il était une fois...

Il fut un temps où toute ma vie était tracée.
Je savais où j'allais, dans quel ordre les grands évènements de ma vie prendraient place, avec qui, et pourquoi.
Il était à moi, j'étais à lui, tout se déroulerait selon la logique des normes.
Une fille, un garçon, un couple, un mariage, un enfant, puis un autre...

Dans mon petit esprit pétri de certitudes, je ne m'étais jamais vraiment posé la question... Et si la vie n'avait pas prévu ça pour moi, et si ce n'étais pas le bon, si je me trompais de chemin.

Alors quand les premiers indices ont commencé à se révéler, j'ai refusé de les voir, j'ai fermé les yeux le plus fort possible.
J'avais CHOISI.

C'est moi que j'ai trahi en premier.
Je me suis menti, j'ai tu la petite voix qui me disait "est-ce bien vrai tout ça?", j'ai fermé toutes les portes de mon esprit pour enfermer cette voix qui me criait que je vivais un conte qui virerait tôt ou tard au cauchemar.
L'ego, le premier et le plus intime ennemi. Celui qui nous connait le mieux, sait le mieux contourner notre âme pour se satisfaire au prix de la vérité. Je me suis menti parce que j'avais honte de m'être trompée.
Honte d'avoir choisi avec la tête plutôt qu'avec le coeur, ce qui est pourtant contraire à mes idéaux. Honte de ne pas être fière de celui qui partageait ma vie, de ne pas le trouver beau, fort et intelligent, de ne pas l'admirer.
Alors mon ego a contourné le problème. Il était mon égal et c'était bien mieux. Il était mon confort, mon plan épargne vie. 0% de risques, et 100% de tendresse. On ne peut pas tout avoir.

Sauf que la vérité vous rattrape un jour.
Fuir la vérité c'est comme fuir la lumière. Je me suis enfoncée dans des rêveries nocturnes, qui ont contaminé mes journées, et bien vite je me suis perdue.
Comme une toxicomane. Je ne pouvais pas fonctionner au quotidien sans ma dose de fantasmes. Ils me suivaient partout. Au travail, dans les transports, quand je faisais les courses. Je me forçait à rester ancrée à la réalité pendant le bain et le dîner de la petite, et puis dès qu'elle était couchée, je me replongeais au plus vite dans mon univers privé. Le jour, la nuit. Je luttais contre le sommeil pour gagner des minutes de rêve éveillé. Je me sentais plus vivante derrière mes paupières que dans la réalité.

Et puis mon imagination a commencé à s’essouffler, et il a bien fallu que je regarde plus souvent la réalité en face.
Je ne savais plus qui j'étais.
Je savais qu'il faudrait mettre un terme à tout ça, mais je cherchais à gagner du temps.
Mon ego cherchait encore à se débattre, mais la douleur et la solitude prenaient le dessus pas à pas. Ma peau ne sentait plus rien, mes sourires étaient des grimaces, je me regardais dans le miroir et je ne voyais rien... personne dans mes yeux... je ressentais un vide indescriptible.

Je ne suis pas suicidaire, je ne l'ai jamais été. J'ai toujours cru en la vie et elle m'a toujours gâtée. C'est cette "foi" qui m'a permit d'avancer encore un peu plus, et encore, et encore, avec la certitude, ou peut être simplement l'espoir, que la vie me trouverait une solution.

J'avais commencé a accepter qu'il fallait que je quitte mon mari. Celui que j'avais CHOISI pour être mon compagnon et le père de mes enfants. J'ai essayé de toute mes forces de l'aimer encore et tout ce que j'ai réussi à faire, c'est me détacher de lui jusqu'au dégoût.
Pourtant j'avais promis. Promis que je ne le quitterais pas, que je lui donnerais un autre enfant, qu'on se construirait une maison, une vie rêvée ensemble... Alors j'avais honte de tout casser, de revenir sur mes promesses. Au delà de la peur d'être seule, c'était la peur de devoir revenir sur mes promesses qui me faisait rester. La solitude me terrorisait bien sûr, mais la situation avait tellement pourri que je me serai sentie mieux seule qu'à ses côtés.

Et puis la vie m'a fait un cadeau que je ne pouvais pas refuser.
Je suis tombée amoureuse. Amoureuse comme jamais je ne l'ai été dans ma vie d'adulte. Amoureuse comme je ne pensais jamais plus l'être. Ce sentiment qui vous transporte, vous donne l'impression de voler. Le sommeil n'avait plus d'importance puisque les journées avaient un goût de rêve.
Et pourtant j'ai lutté comme j'ai pu pour ne pas faillir. Je n'utilise pas ces mots par hasard.
Comme j'ai pu. Pas "du mieux que j'ai pu", pas "de toute mes forces". Parce que d'une part je n'avais plus de forces et d'autre part, comment peut-on lutter "du mieux qu'on peut" contre ce qu'on désire plus que tout?
Alors je suis montée tout en haut du plongeoir, j'ai fermé les yeux et j'ai sauté.


En écrivant le début de ce chapitre, je pensais finir en disant qu'aujourd'hui, j'ai perdu toutes mes certitudes et tous mes repères, et je cherche tant bien que mal mon équilibre.

Au fil des mots je réalise que certes, j'ai perdu mes certitudes, mais j'ai touché ma vérité.
La vérité est une amie fuyante. On la cherche, elle se cache, on la teste, et elle se montre...
Chaque jour, je vérifie que je suis bien le chemin de ma vérité. Parfois cela me cause de grandes frustrations, l'impression de suivre un feu follet...
Et je lutte contre la peur de me tromper encore et de me mentir encore.
Chaque jour, je lutte contre mon ego pour le faire taire, et lui rappeler que certes, j'ai manqué à toutes mes promesses, et abandonné celui que j'avais choisi. Mais la vie m'a fait un cadeau inestimable et pas un seul jour je n'ai regretté... alors il n'y a pas de honte à savourer chaque minute de cette nouvelle vie, parce que la vie, ma vérité, m'a pardonné.


Il était une fois une jeune fille qui s'était laissé guider par son ego...





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